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Le Lion de Belfort

Le colonel Pierre Denfert-Rochereau et son cousinage avec le sculpteur Auguste Bartholdi


Les liens de parenté entre Pierre Denfert-Rochereau (1823-1878) et Auguste Bartholdi (1834-1904) existent par des mariages entre familles protestantes (luthériennes) de la région colmarienne et du comté de Montbéliard. En effet, le suivi de relations entre familles remonte à l’époque des possessions par les ducs de Wurtemberg du comté de Montbéliard et des seigneuries de Riquewihr et de Horbourg du XIVe siècle jusqu’en 1793 et 1796. Avec la Réforme imposée par les ducs, ces possessions sont devenues luthériennes.

Barbara Graff (1768-1842), la grand-tante maternelle d’Auguste Bartholdi, a épousé Pierre Noblot (1770-1841), membre d’une famille luthérienne connue à Montbéliard depuis le XVe siècle : filateur à Héricourt, il succède à son père à la tête de l’industrie familiale de cotonne. Leur fille Anne Catherine Noblot (1796-1895), cousine germaine de Charlotte Beysser (1801-1891), la mère d’Auguste, épouse François Goguel (1790-1852, négociant et percepteur, de Montbéliard. La famille Goguel est luthérienne avec une lignée de conseillers de régence et de maire de Montbéliard.
François Goguel est petit-cousin germain de Philippe Henri Goguel (1771-1849), maire de Montbéliard, dont la fille Louise Pauline (1804-1866) épouse le pasteur Jean Georges Surleau (1803-1876), président du Consistoire de Montbéliard ; en 1852 à Montbéliard, leur fille Pauline Louise Surleau devient la femme du futur colonel Pierre Denfert-Rochereau, le glorieux défenseur de Belfort en 1870-1871, depuis surnommé le « Lion de Belfort ». En 1863 nommé commandant chargé des travaux de fortifications de Belfort, il devient en 1870 colonel et gouverneur de Belfort.
Pierre Denfert-Rochereau (1823-1878) est aussi un militant protestant, issu d’une famille réformée de la petite bourgeoisie de l’Ouest de la France. Pendant son affectation en Algérie (avant Belfort), il est conseiller presbytéral de la paroisse de Blida.



Arbre de parenté entre Auguste Bartholdi et Pierre Denfert-Rochereau - Détail dans le tableau en bas de page.

Ces liens de parenté ne pouvaient être méconnus d’Auguste Bartholdi d’autant que lui-même était engagé lors de la guerre 1870-71 : il est chef d'escadron des gardes nationales, aide de camp du général Giuseppe Garibaldi [1] (1804-1882) et agent de liaison du gouvernement, particulièrement chargé de s'occuper des besoins de l'armée des Vosges. C'est au cours de cet engagement patriotique que Garibaldi et Léon Gambetta (1838-1882) le confortent dans son amour de la république et de la démocratie en exaltant les valeurs de la liberté.

Timbre du 100e anniversaire du siège de Belfort (1870-1871). Représentation du lion de Belfort et du colonel Pierre Philippe Denfert-Rochereau (1823-1878) - première émission : 16 novembre 1970.

Pierre Denfert-Rochereau, mis en disponibilité, devient en février 1871 député du Haut-Rhin [2] à l’Assemblée Nationale jusqu’en 1876, où, inscrit à la Gauche républicaine, il soutient la politique de Léon Gambetta, puis député de Paris de 1876 à sa mort dans le 6e arrondissement de Paris (celui où habitait Bartholdi).

Il est aussi membre de la paroisse réformée de l’Oratoire du Louvre, comme Auguste Bartholdi. Protestant convaincu, il restera toute sa vie un ferme partisan de la théologie libérale. En 1872, lors des élections presbytérales de l’Église réformée de Paris, il est candidat sur la liste libérale, mais il n’est pas élu. Il est délégué au Synode général de l’Église réformée de 1872, où il défend les positions des libéraux votant en particulier contre l'adoption de la Déclaration de foi proposée par François Guizot et Charles Bois, du courant protestant orthodoxe.
Lors de la crise du 16 mai 1877, il est l'un des signataires du manifeste des 363. Il est réélu député en octobre 1877 et est confirmé dans ses fonctions de questeur à l’Assemblée. Mais, il meurt moins de sept mois plus tard à Versailles, le 11 mai 1878. Il est inhumé dans le cimetière de Montbéliard, son épouse l'y rejoindra en 1906.



[1]  Nommé par Léon Gambetta, ministre de l'Intérieur et de la Guerre, le général Garibadi assure le commandement de l'Armée des Vosges ; il était arrivé à Marseille le 7 octobre 1870. En février 1871, il est élu député de l'Assemblée Nationale à Bordeaux, alors capitale provisoire de la France ; mais en raison de sa nationalité italienne, son élection est invalidée. Le 13 mars 1871, il quitte la France pour l'Italie, à Caprera où ik décède en 1882.

[2]  C’est-à-dire de l'arrondissement de Belfort, seule partie du Haut-Rhin et de l'Alsace restée à la France après la défaite de 1871 : il est nommé à l’époque « arrondissement subsistant du Haut-Rhin ». En 1919, il ne réintègre pas le Haut-Rhin, et devient officiellement un département français le 18 février 1922 sous le nom de Territoire de Belfort, non plus rattaché à l'Alsace mais à la Franche-Comté.


 

Belfort : le Lion de Belfort, statue de Bartholdi

Erigé au pied de la citadelle, le Lion de Belfort est un haut-relief réalisé entre 1875 et 1880 par Auguste Bartholdi pour la ville de Belfort : en orientant le lion vers l’ouest, il lui faisait volontairement tourner le dos à l’adversaire en pointant la flèche vers la frontière allemande.
Cette statue en l'honneur des défenseurs de Belfort symbolise la résistance du colonel Pierre Denfert-Rochereau durant le siège de la place forte de Belfort en 1871 contre les Prussiens.

Le maire de Belfort, Edouard Meny (1818-1891), sur le conseil d’un de ses amis, s’adresse directement à Bartholdi au début de l’année 1872 pour un monument commémoratif des victimes du siège. Le sculpteur y répond favorablement. Son choix fut sûrement inspiré par le surnom Lion de Belfort du cousin colonel.
Dans une lettre adressée au maire de Belfort, Bartholdi mentionne pour le futur monument :
Ce n'est ni une victoire, ni une défaite qu'elle doit rappeler ; c'est une lutte glorieuse dont il faut transmettre la tradition pour la perpétuer (...) Le monument représente sous forme colossal un lion harcelé, acculé et terrible encore en sa fureur. Il serait placé sur un piédestal appliqué contre la paroi du rocher, à une hauteur que je n'ai pas pu mesurer, mais qui se détermine facilement sur place avec l'aspect des dessins. Je suppose qu'il faudra donner au Lion une hauteur de quatre mètres, il serait exécuté en belle pierre blanche ; le piédestal serait d'environ cinq mètres en granit gris. L'ensemble se détacherait admirablement sur la masse sombre et frustre du rocher, ce serait visible à très grande distance.
La vision de Bartholdi connaît de nombreuses évolutions y compris concernant les dimensions de la sculpture qui finalement mesure 11 m de haut pour 22 m de long et sera en grès rouge des Vosges (la version finale ci-dessous).

Ce monument, avec celui du général Rapp à Colmar, et peut-être le visage de la statue de la Liberté, ont été inspirés par un membre de la famille du sculpteur Bartholdi. En outre, rappelons que de nombreux auteurs, surtout récents, ont totalement omis l'importance de l'origine et de l'éducation protestante à la fois de Bartholdi et de Denfert-Rochereau, souvent à cause de l'origine catholique de ces auteurs.

Paris : réplique du Lion de Belfort, statue de Bartholdi

Lors du salon de sculpture de 1878 à Paris, Bartholdi expose hors concours un modèle en plâtre reproduisant le lion au tiers de sa taille définitive. Le conseil municipal parisien l'acquiert en 1880 pour la somme de 20 000 francs et souhaite l'installer aux Buttes-Chaumont, mais la pétition des habitants du 14e arrondissement demande d’en faire un symbole fort de Paris érigé sur place Denfert-Rochereau. Ainsi sera fait par une sculpture en plaques de cuivre repoussé d'Auguste Bartholdi, installée le 21 septembre en 1880 et dédiée À la Défense Nationale 1870-1871.
Au-dessus de cette inscription, un médaillon en bronze du portrait du colonel Denfert-Rochereau fut apposé en 1920. Retiré et fondu sous le régime de Vichy, il a été remplacé en 1977.

Statue du Lion de Belfort au début des années 1900 - la flèche mentionne le lieu du médaillon, figuré ci-dessus, après 1977.


Quelques références

Sahler L. (1913). Portraits montbéliardais des XVIIIe et XIXe siècles. Champion, Paris, 74 p., 31 pl.

  • https://musees.belfort.fr/citadelle/le-lion-de-bartholdi-951.html

  • http://www.paris-autrement.paris/le-lion-de-belfort-paris/


  • Détail du lien de parenté Denfert-Rochereau - Barholdi (par alliance)

     BARTHOLDI Frédéric Auguste (1834-1904)
    fils de BEYSSER Augusta Charlotte (1801-1891)
    fille de  GRAFF Catharina Margaretha (1765-1825)
    sœur de  GRAFF Maria Barbara (1768-1842)
    mère de  NOBLOT Anne Catherine (1796-~ 1895)
    conjoint de  GOGUEL François Gaspard Ferdinand Eugène (1790-1852)
    fils de  GOGUEL Eberhard Frédéric (1755-1835)
    fils de  GOGUEL Charles Jérémie (1711-1786)
    père de  GOGUEL Charles Louis (1741-1807)
    père de  GOGUEL Philippe Henri (1772-1849)
    père de  GOGUEL Louise Pauline Dorothée (1804-1866)
    mère de  SURLEAU Pauline Louise Henriette (1830-1906)
    conjoint de  DENFERT-ROCHEREAU Pierre Marie Philippe Aristide (1823-1878)

    Nota : pas d’ancêtres en commun



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