Fermer la fenêtre

Les immeubles 3-Fenêtres, un particularisme typique de Marseille
de la fin XVIIe au début XXe siècles

 

Vers la fin du XVIIe siècle, on assiste en France à une amélioration générale des conditions de l'habitation, avec une reformulation conjointe de l'univers domestique et des espaces publics.

À Marseille, c’est à partir de cette époque que les immeubles « 3 Fenêtres » (dits aussi 3-Fenêtres marseillais) reprennent pour l'essentiel, en les perfectionnant, les agencements spatiaux des types ancestraux à une et deux travées en façade, avec une amplification générale des dimensions immobilières et des îlots urbains. C'est est un immeuble d'habitation historique, spécifique et typique à Marseille, devenant dominant dans le parc immobilier du centre-ville tout au long de sa période de production : de la fin du XVIIe siècle aux premières décennies du XXe siècle. Cette grande représentativité vient de son adoption par l’ensemble des classes sociales de la ville.

A l'unicité de l’aspect extérieur de l'immeuble et de sa parcelle correspond une assez grande diversité de découpages internes : en effet, selon son statut social, une famille peut occuper un logement qui s'organise sur la moitié de l'étage jusqu’à la totalité de l'immeuble, en passant par diverses solutions intermédiaires. Néanmoins, l'immeuble à « 2 Fenêtres » restera un type concurrent jusqu'à la charnière des XVIIIe et XIXe siècles quand le « 3 Fenêtres » devient sans conteste le type dominant.
Puis, une évolution morphologique du type "3 fenêtres" se met en place, notamment des formes strictement orthogonales, la largeur du couple bâti-parcelle, aux alentours de 7 mètres, forme et position unique pour l'escalier, disposé centralement et en appui sur l'un des murs de refends, et qui fonctionne dorénavant comme un véritable stéréotype. Ainsi, le « 3 fenêtres » devient la réponse quasi unique aux programmes d'habitat marseillais.

Au XIXe siècle, il correspond une diversité de types de logements pouvant être ramenées à un schéma unique pour une surface utile de base 6,50 x 13 m, avec quatre catégories de logements selon qu'ils occupent un 1/2 étage (le modèle populaire le plus répandu), l’étage, plusieurs étages (2 ou 3), la totalité de l'immeuble. En 1864, Maurin écrivait : « Le logement d'une famille se compose d'une chambre et d'une cuisine, le moindre cabinet reçoit un lit et souvent deux, communément la chambre à coucher sert pendant le jour de salle de travail et c'est peut-être préférable au séjour prolongé dans certaines boutiques mal aérées, mal éclairées et très humides. »
D'après un mémoire en architecture daté de 2008, ces immeubles représentent encore 20% du bâti du centre de la ville de Marseille.

Dans ces immeubles du centre-ville, les rez-de-chaussée ou rez-de-jardin (à Marseille, les rues sont généralement en pente !) possèdent tous un jardin d'agrément arboré à l'opposé de la rue, ce qui a comme conséquence que Marseille est une ville les plus vertes de France, mais à l'abri des régards - voir ci-dessous la vue aérienne de la Rue Chaix.


Planche 3 : Axonométrie éclatée du 3 fenêtres - d’après Bonelli (INAMA, 1988).

Les caractères généraux du modèle technique de l'architecte Victor Leroy (1847) sont sous forme d'un devis descriptif et estimatif, tous deux fort détaillés, établis pour un immeuble typique 3 Fenêtres marseillais, avec les points principaux :

  • la structure porteuse : il s'agit de murs mitoyens construits en maçonnerie de pierres non appareillées. Ces murs sont communs à deux immeubles contigus et leur épaisseur varie avec la hauteur (0,73 jusqu'au plancher du rez-de-chaussée ; 0,30 mjusqu'au dernier étage) ;
  • éléments de franchissement : ce sont des poutres transversales en bois du Dauphiné (de section circulaire ou carrée), qui ne participent que faiblement au contreventement du système. Ce système est employé aussi bien pour les planchers que pour la toiture ; il n'existe donc pas de charpente complexe ;
  • l'enveloppe : nous avons ainsi désigné la toiture à double pente (entre 25 et 33%) et les façades (sur rue et sur cour). Ces dernières qui participent au contreventement sont en pierre de taille appareillées, ou en moellons ;
  • l'escalier : il s'agit d'un dispositif technique original, car son ossature porteuse est constituée de "genoux", pièces de bois qui s'encastrent dans le mur mitoyen.

 

 


Ci-dessous, comme exemple, notre rue Chaix, sise dans le 7e arrondissement, dans la montée vers ND de la Garde, ses constructions datent de la deuxième moitié du XIXe siècle avec quelques maisons « 2 Fenêtres »(comme la nôtre à droite sur la photo de gauche) et les autres des « 3 Fenêtres » avec des appartements 1/2 étage ou étage selon la longueur (à l'origine). Tous les rez-de-chaussée ou rez-de-jardin ont un jardin privatif (photo de droite des maisons à droite de la rue).

IMMEUBLE 3-fenetres

Quelques références

Bonillo J.L. et al. (1988). Atlas des formes urbaines de Marseille. Vol. 1 (Les types), 194 p., INAMA, Marseille.

Leroy V. (1847). Notice sur les constructions de maisons à Marseille aux XIXe siècle. Répertoire des travaux de la Société de Statistique de Marseille, tome 10, p. 35-152.

Maurin S.-E. (1864). Marseille du point de vue de l’hygiène et de la statistique médicale. Répertoire des travaux de la Société de Statistique de Marseille, tome 27 : chapitre VI.  Maisons, p. 106-110.


  • Cartes-plans-rues de la Ville de Marseille
  •