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Le Massif montagneux des Vosges : frontière linguistique, religieuse, culturelle


Tout de suite, il faut mentionner que l'invention de la montagne-frontière ne commence qu'au XVIe siècle avec l'invention des consciences nationales. Les cimes des Vosges (Vogesen en allemand), aussi parfois appelé la "ligne bleue des Vosges" marque la séparation de l'Alsace avec le duché de Lorraine. Les deux régions faisaient partie du Saint Empire romain germanique dès son origine. Puis, la Lorraine devient souveraine en 1542 jusqu'en 1766 quand le duché est intégré dans le Royaume de France. Pourtant, jamais, cette "frontière" ne fut réellement contraignante, même entre 1871 et 1914 et il y eu une relative libre circulation, au moins pour les frontaliers.

Le massif montagneux des Vosges ne constituait en aucune façon un obstacle aux déplacements, ni aux liens par mariage entre familles lorraines et alsaciennes... au sein de populations bien intégrées au milieu montagnard. Les routes par divers cols comme Bussang, Schlucht, Bonhomme, Sainte-Marie... permettaient le passage et les échanges Est-Ouest, notamment Italie-Flandres.
À noter que le massif des Vosges est anthropisé depuis des millénaires, ce qui a profondément modifié sa flore et sa faune, notamment les chaumes suite à la déforestation des cimes et la disparition des grands mammifères, dont l'ours.

Du point de vue linguistique, on parlait allemand à l'est, roman à l'ouest, mais là encore avec des exceptions de quelques vallées welches du côté alsacien et de la région germanophone au Nord de la Lorraine (correspondant globalement au département de la Moselle).

Protestants et catholiques se distribuent en fonction des possessions tant en Alsace qu'en Lorraine, où, néanmoins, les répressions des protestants auront lieu dès la fin du XVIIe siècle, tandis qu'en Alsace, il y eu une protection certaine par l'Empereur allemand. Pourtant, il y eut accueil des anabaptistes dans bien des possessions lorraines, notamment par le prince de Salm-Salm.

La frontière linguistique et culturelle passant par les Vosges depuis plus d'un millénaire, le Rhin n'était autre qu'un fleuve traversant le "fossé rhénan" et plus largement la "plaine du Rhin supérieur" (dont l'Alsace n'est qu'en partie le versant ouest). Il devient frontière de l'Etat français au cours de la Révolution et durant les périodes françaises. Aujourd'hui, bien des Alsaciens souhaiteraient un retour à une région transfrontière dans le cadre de l'Union Européenne.


À lire :

Académie de Strasbourg (2017). Lithothèque Alsace, Géologie régionale. http://www.lithotheque.site.ac-strasbourg.fr/geologie_regionale, consulté le 20 mai 2017.

Godron D. A. (1870). Les perles de la Vologne et le Château-sur-Perle. Mémoires de l'Académie de Stanislas, Nancy, 1869, p. 10-30.

Kammerer O. (2003). Les Vosges sont-elles une montagne au Moyen Âge ? Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public, 34 (1), p. 23-39.



De la formation des montagnes des Vosges,
d’après un poème de Philippe Antoine Chainel,
sous le titre La Cinthyperléyade ou l’ordre de Diane :

…les Titans vaincus en Thessalie par les Dieux, auxquels ils avaient l'intention de ravir l'Olympe, se réfugièrent, non pas à Tartèse près de Cadix, comme le prétend Ovide, mais dans les Vosges [Note C.E. : il s’agit du département]. Après avoir franchi le Rhin, ils résolurent, pour assurer leur défense, d'élever à peu de distance de la rive gauche de ce fleuve, un rempart inexpugnable. Ils accumulèrent, comme ils l'avaient fait en Grèce, montagnes sur montagnes et formèrent ainsi la chaîne des Vosges abrupte du côté du Rhin, pente à l'ouest, et telle est encore aujourd'hui la conformation que présentent ces montagnes. Les Dieux les y suivirent, les forcèrent dans leur camp que l'auteur place sur le plateau de Chamdrai et les repoussèrent dans le bassin de Gérardmer, où ils leur livrèrent bataille. Ils y remportèrent sur ces audacieux rebelles une victoire décisive, et les principaux chefs des Titans, Typhon, Pelor, Hyppolite, Palibotte furent faits prisonniers, ainsi qu'un grand nombre de leurs soldats. …/…
extrait p. 17-18 de Godron (1870).

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