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Répression de l'hérésie protestante

La chasse aux sorcières qui sévit dans toute l’Europe occidentale catholique au tournant des XVIe et XVIIe siècles s’inscrit dans le contexte des guerres de religion, de la Réforme protestante et surtout de la Contre-Réforme catholique, c’est-à-dire dans un processus de conquête ou de reconquête des masses populaires par l’église catholique. La lutte contre le diable et ses suppôts – les sorciers – semble prolonger idéologiquement les procès menés dans la première moitié du XVIe siècle contre les hérétiques auxquels sont rapidement assimilés les protestants.

La chronologie de la répression de l’hérésie protestante (1520-1585) et de la chasse aux sorcières (1560-1630) répond à celle de la mutation de la procédure criminelle en général.
Vers 1550-1570, l’église catholique marque un changement d’attitude vis-à-vis de la sorcellerie, considérée comme favorisée par la Réforme : il poussa les deux tendances à affiner leurs dogmes et à rejeter d’autant plus violemment les notions divergentes : la sorcellerie était désormais considérée comme la fille des hérésies et des troubles religieux issus de la Réforme protestante. L’église catholique condamnait sans appel toutes les superstitions diaboliques, car il s’agissait d’une lutte sans merci contre le Mal, contre toutes les hérésies.
Le christianisme superficiel des masses rurales, teinté encore de paganisme, fut conçu par les élites catholiques laïques ou ecclésiastiques sous forme de sorcellerie : « Détruire les hérétiques, brûler les sorcières, refouler les superstitions populaires étaient autant de formes d’un même programme de purification interne ». Si les bûchers de sorcellerie furent rares durant les cinquante premières années de la réformation, au moment de la lutte la plus ardente contre les hérétiques, ils s’allumèrent en visant les protestants. Lorsqu’ils s’éteignirent à leur tour, à partir des années 1630 après l’échec de la Contre-Réforme, la lutte contre les superstitions paysannes prit encore plus d’ampleur que précédemment.

A la différence de la France et des Pays-Bas, au Saint Empire, la paix d’Augsbourg, promulguée en 1555 par l’empereur Charles-Quint, a permis d’éviter les violences physiques. Vers la fin du siècle, on assiste à un rapprochement entre luthériens et catholiques. En Alsace, l’annexion en 1680 par Louis XIV, roi de droit divin, et la pression de l’église catholique française a rompu ce rapprochement et rendit les relations délétères jusqu’au milieu du XXe siècle ! Rappelons qu'aujourd'hui encore la loi de 1905 sur la laïcité ne s'y applique pas.
En effet, au moins depuis le XIIIe siècle, l’élection de l’empereur du Saint Empire par un petit corps des plus grands princes de l'Empire, les princes-électeurs, a eu des conséquences directes lors de l’adoption de la Réforme par des rois et des princes du Saint-Empire romain, dont certains furent des princes-électeurs. Le meilleur exemple est la paix d’Augsbourg qui constitue une véritable césure politique et religieuse dans l’histoire de l’Empire. Celle-ci entérine la réalité et sanctionne la renonciation définitive à une seule confession dans l’Empire. Désormais deux religions sont juxtaposées : l’Eglise catholique et les évangéliques membres de la Confession d’Augsbourg (Augsburgischen Confessionsverwandten), soit les seuls luthériens, ce qui exclut les anabaptistes, les zwingliens et les calvinistes (ou réformés). Ces derniers n’obtiendront leur reconnaissance juridique qu’en 1648.
Ce compromis est devenu un jalon de l’histoire allemande sous divers aspects : le Saint Empire cesse d’avoir une connotation sacrée et c’est la fin de sa conception universaliste comme de celle de la chrétienté. Dans les Etats protestants, les princes et magistrats urbains se voient attribuer les droits épiscopaux, une décision qui sanctionne un processus en gestation depuis les années 1520. Désormais, l’Etat étend son pouvoir sur l’ensemble des domaines ecclésiastiques. Les principautés et les villes libres sont ainsi les grands bénéficiaires de la Réforme sur le plan politique.
La paix d’Augsbourg a largement contribué à installer définitivement le luthéranisme dans l’ensemble de la Haute Allemagne aux dépens des idées sacramentaires (zwingliennes) et réformées et à consolider la mainmise des princes sur l’Eglise. Ainsi, 1555 marque l’apogée du protestantisme dans l’Empire dont il couvre la plus grande partie.


Références : voir go


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