Famille BOUISSON

Bouisson Anne Sophie (1809-1871), son fils Alphonse Moutte (1840-1913) - et - leurs descendants à Marseille

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Alphonse Moutte, né et mort à Marseille - 1840-1913 -, fut peintre naturaliste marseillais de l'Ecole Provençale du XIXe siècle.
Il est le fils de Anne Sophie Bouisson et de François Moutte. Il fut marié avec Thérèse Heraud (1842-1931), ils eurent deux enfants.

Il suit les cours de l'École des Beaux-Arts de Marseille où il a notamment Émile Loubon (1809-1863) pour professeur. Il poursuit l'apprentissage de son art à Paris et travaille dans l'atelier d'Ernest Meissonier (1815-1891). C'est là au cours d'une démonstration du zoopraxiscope par le photographe américain Muybridge, qu'il découvre ces instantanés de la vie qui vont marquer ses tableaux.

Autoportrait - A. Moutte

Elève de Loubon, Alphonse Moutte fut le peintre le plus représentatif du Naturalisme  provençal dont l’expresion privilégiée était les scènes quotidiennes et la vie populaire. Il reproduit les scènes rustiques, y ajoutant la vie des pêcheurs dans des toiles débordantes de lumière. Professeur d’Olive, il est à la charnière des générations.

Chez lui, le naturalisme scrupuleux se fonde sur un reportage qui apporte la connaissance immédiate de la réalite, ce que garantit le Vérisme, et il y intègre le spectateur. Un bel exemple est le tableau Coin de la Plage du Prado (Marseille, 1882) - et en eau-forte Pêcheur sur la plage du Prado (voir ci-dessous) : pendant l'hiver, il a transformé en atelier une cabine de bains sur cette plage et venait peindre tous les matins. On y retrouve l'ambiance de la plage le matin tôt, le mouvement des vaguelettes, la fraîche brise matinale et le pêcheur qui court pieds nus sur le sable. Jeune chercheur au CNRS, j'ai connu cet atmosphère dans les années 1960 venant une ou deux fois par semaine sur toute l'année récolter des phoronidiens en plongée à quelques encâblures de ce lieu. Un autre tableau est donné ci-dessous : La Régalade (Marseille, 1882) aussi nommé Le déjeuner des pêcheurs qui traduit cette même vision du peintre.
Un autre tableau, Le Débarquement des blés (1876, ci-dessous), avait déjà montré la pleine mesure de Moutte avec un troublant hyperréalisme, illustrant le système économique basé sur la trilogie négociant, capitaine-marin, portefaix. Là aussi pour mieux saisir ses instantanés, il loue un petit local à côté de ce quai sur le Vieux-Port de Marseille.

Autoportrait - A. Moutte de 1896

Dès 1869, il expose au Salon avec des dessins. Dès 1890, la grande presse parisienne décèle en Moutte un peintre ardent, qui sait rendre la vie bruyante du Midi. En 1896, il assure la présidence des Artistes Marseillais et sucède à Antoine Dominique Magaud en devenant directeur de l'École des Beaux-Arts et de l'École d'Architecture de Marseille, jusqu'en 1913. Professeur dans cette même école où il a formé, entre d'autres, le peintre Jean-Baptiste Olive (1848-1936) et le sculpteur Ary Bitter. Moutte Alphonse est un des représentant de la deuxième génération de l’École provençale, héritière de Loubon. Marseille et sa région lui offrent ses principaux sujets d'inspiration. En 1872, il est nommé membre de l'Académie de Marseille. Il est ami de Frédéric Mistral et d'Alphonse Daudet, avec eux défenseur du Félibrige et de la culture provençale - lire aussi Bertin (1882, p. 65-66).

Il décède le 21 avril 1913 . Il a été très affecté par le décès la même année de son petit fils Marc Samat, à l'âge de 18 ans.

Son nom a été donné à un boulevard de Marseille dans le 13e arrondissement.

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Autres liens :  Amateurs de l'œuvre du peintre   -   wikipedia   -   Fondation Calvet


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Quai de la Fraternité (Vieux-Port, Marseille), 1876.
[à gauche avec le chapeau, ce courtier
est le peintre lui-même]

 

Promeneurs sur la Corniche (Marseille) - avant 1913.
< C'est à ce même endroit qu'une cinquantaine d'années plus tard les enfants d'Anne Bouisson, épouse Emig, habitant à une vingtaine de mètres - rue ND des Grâces - de 1965 à 1971, se baigneront !

 

Les Goudes (Marseille), 1910 

 

 

 


Lou Gusta (le déjeuner)

 

 

 

 

 

Le débarquement des blés (Marseille), 1876.
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Anne Sophie Bouisson fut veuve très jeune avec un fils unique, le petit Alphonse, qui avait alors 5 ans [1]. Elle se remaria avec Joseph Faucon [2] qui exerçait le même métier que son défunt mari, à savoir courtier en blé. Il éleva Alphonse Moutte et lui céda même son affaire de courtage sur le port de Marseille; mais le jeune homme n'aimait pas ce métier, car il préférait la peinture. En bon fils [3], il attendit le décès de sa mère, rentière, en 1871 [4], pour quitter le courtage en blé et vivre de sa peinture. Anne Sophie Bouisson est enterrée au cimetière Saint Pierre à Marseille, tout comme son fils Alphonse.

Elle est aussi à l'origine de l'achat de la propriété Moutte dans le quartier Saint-Just - Montolivet [5]. Cette maison fut l'atelier "de campagne" d’Alphonse Moutte,  où l’une de ses descendantes, Catherine Lorenzi, a grandi et vit toujours.

En effet, Alphonse Moutte s’est marié en 1866 avec Thérèse Heraud. Deux enfants naîtront : un garçon, Marcel, mort sans descendance; une fille, Marie Thérèse, en 1866 [3], qui épousa  un des élèves de son père, Jean Baptiste Samat (1865-1930), fils de Toussaint (1837-1916) le fondateur et directeur du journal "Le Petit Marseillais", puis lui-même directeur de ce journal, écrivain, historien, et peintre à ses heures. Le couple eut trois garçons et une fille : Jean-Toussaint (1892-1944), Marc (1895-1913), Marcel (1898-1961), et Annette(1906-1993). Marcel dont la fille unique, Marguerite (née en 1923), est la mère de Catherine Lorenzi à qui nous devons une grande partie de ce texte et aussi des photos.

 

 

Huile sur toile 1,50x2m (inachevée) représentant la famille du peintre sur la terrasse de la maison à St-Just, vers 1895.

 

 

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Les dernières semailles du printemps
Récompense du Jury : Médaille de 3e Classe in : Supplément au Catalogue illustré du Salon (1881). L. Baschet, Paris, p. 452.


Portrait d'Oleg Tripet Skrypitzine, un Russe, bienfaiteur de la ville de Cannes, grand ami d'Alphonse Moutte à qui il servit souvent de modèle.


Ils furent parfois considérés par erreur
comme des autoportraits du peintre.

 

 

Portrait d'un inconnu




Alponse Moutte avec sa fille Marie Thérèse posant pour lui

[Photos du peintre © Catherine Lorenzi]

Anne Sophie Bouisson est la fille de Joseph Bouisson (1781-1851) et Marie-Catherine Roboly (1787-1857), elle est née le 17 novembre 1809 à Smyrne (Izmir, Turquie). Elle est venue en France, à Marseille, avec ses parents, sa soeur Adèle et son frère cadet Jules. L'aîné Jean-Baptiste est resté en Turquie et s'est marié à Constantinople avec Hélène Dapery - les arrière-arrière-grands-parents d'Anne Bouisson.
Elle a épousé François Moutte (1801-1847) le 11 juillet 1835 à Marseille, puis, après le décès de ce dernier, Joseph Faucon en secondes noces, le 23 janvier 1849.
La famille Bouisson est originaire de Trets et la famille Moutte de Pourrières, deux bourgs espacés de 8 kilomètres, entre Aix-en-Provence et Saint-Maximin.

Les descendants d'Anne Sophie Bouisson et de François Moutte sont représentés sur l'arbre ci-dessous :

Ses domiciles marseillais :

[1]  49, cours du Chapitre (aujourd’hui cours Joseph Thiéry, 1e)
[2]  103, bd de la Magdeleine (aujourd’hui bd de la Libération, 1e)
[3]  106, rue St-Jacques (6e)
[4]  116, rue Sylvabelle (6e)
[5]  allée des mésanges (12e)

Huile sur acajou : Mas provençal


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Eau forte de Moutte / Gravure Boulard :
Pêcheur sur la plage du Prado (Marseille, 1881)
et une huile sur toile (1882)
Coin de la plage du Prado


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La Régalade (Marseille, 1882)
(vers la Vieille-Chapelle, Marseille, au fond les îles du Frioul.


« Chercheur passionné, épris du grand air et de la lumière, Moutte pénètre l'intimité de la population provençale. Il en dit les travaux, les plaisirs, les paresses, les joies naïves. Maître dans l'art de camper un personnage, il célèbre la vie des pêcheurs et des paysans, conférant de la noblesse aux chevrières, aux bouquetières descendant des collines, aux tambourinaires, aux âniers en culottes de velours. Son impact tient à l'exigence de vérité, l'observation analytique, le détail méticuleux, l'accord de la figure et du paysage. Si le sentiment photographique l'éloigne de Loubon, c'est par le grand format qu'il se dégage de l'influence de Meissonier, son véritable maître. »
Soubiran J.-R. (2014). Le Naturalisme à Marseille (1870-1900), une identité plurielle. In : Ils ont peint à Marseille. Marseille, Revue culturelle de la ville de Marseille, 244, p. 73-78.    



Au cimetière St-Pierre de Marseille, Alphonse Moutte et son épouse Thèrése Héraud sont enterrés dans le caveau de la Famille Philogone Héraud, qui est celui de ses beaux-parents. Aucune inscription n'y indique leur présence. Y sont aussi enterrés ses deux belles-soeurs et quelques descendants. Le caveau se situe dans l'allée des acacias carré 5 midi, face à l'allée 40 carré 5 ouest.

 

Dans ce même cimetière, la mère d'Alphonse, Sophie Bouisson, épouse Moutte, puis Faucon, est enterrée dans le caveau de la Famille Faucon Bertrand, situé dans l'allée des mobiles carré 7 nord, presque en face du monument aux morts de la guerre (Crypte militaire).

A noter que les autres tombes de notre famille Bouisson n'ont pu être retrouvées dans les cimetières marseillais.


Descendants d'Alphonse Moutte (Moutte - Bouisson)

La descendance d’Alphonse Moutte ne se fait que par sa fille Marie Thérèse Moutte (1866-1938) qui épouse  en 1889 Jean Baptiste Samat (1840-1931). Ils ont quatre enfants, dont un fils mort à 19 ans. Descendance en
Il est le fils de Toussaint Samat (1837-1916), le co-fondateur du journal Le Petit Marseillais (voir ci dessous) et de Marie Emilie Peirron (1843-1872). Après un doctorat en droit, il passe au journalisme en entrant en 1886 comme rédacteur au journal du Petit Marseillais, puis en devenant le secrétaire général et le directeur, en y succédant à son père, à la mort de ce dernier en 1916. En 1919, il est élu à l'Académie de Marseille (Repelin, 1932). Il est aussi nommé chevalier de la Légion d’Honneur en février 1913, puis  officier le 8 août 1821. Comme historien et illustrateur, il a publié de nombreux ouvrages, dont deux histoires de Marseille. Il est aussi le fondateur et directeur du Réveil Agricole, un journal hebdomadaire, dont le sous-titre fut agriculture, viticulture, horticulture, élevage, chasse et pêche, foires et marchés, créé le 9 avril 1893 et paru jusqu'en 1967. En 1899, le journal absorbe le Viticulteur, la revue agricole, industrielle et commerciale de la région du Midi (Nîmes, Paris).
Deux de leurs fils entrent aussi au Petit Marseillais.

  • Jean Baptiste Toussaint Paul (1891-1944), au retour de son service militaire en Algérie, il entre au journal comme journaliste. Puis il s’engage dans l’aviation lors de la première guerre mondiale. Il est grièvement blessé  lors d’un crash – voir son livret militaire. En 1920, il habite Paris et y commence une carrière d’écrivain sous le nom de plume de Jean Toussaint-Samat, notamment avec des romans policiers ert d'aventures. En 1926, il se marie en secondes noces avec la traductrice Renée Vally (1894-1984) : leur fille Maguelonne Samat (1926-2018) devient une écrivaine sous le nom de plume de Toussaint-Samat (comme celui de son père).

  • Pierre Marie Marcel Samat (1898-1961) est aussi devenu journaliste, co-gérant du Petit Marseillais et directeur du Réveil agricole, fondé par son père. En 1922, il se marie avec Elise Pierrette Cauvet (1898-1991), fille de Baptiste Louis Cauvet, minotier, né à Meyrargues.
    Dès 1941, une âpre bataille sévit entre administrateurs du Petit Marseillais à partir du différend qui oppose le directeur Jean Gaillard-Bourrageas (1900-1992) aux administrateurs Jean Savon-Peirron (1874-1964), Marcel Samat (1898-1961) et Maurice Delanglade, qui tentent d'atténuer l'orientation collaborationniste du premier, directeur du journal et petit-fils adoptif du fondateur Denis Bourrageas (1842-1902). Elle se termine par un procès des directeurs du Petit Marseillais, qui les condamnent à mort en octobre 1944 avec suppression définitive du journal : Jean Gaillard-Bourrageas (1900-1992) est condamné par contumace, il décède en exil en Italie, et le directeur en fonction Albert Lejeune est fusillé à Marseille le 3 janvier 1945 (voir références et liens pour les détails).

  • Annette Samat (1906-1993) épouse en 1927, en premières noces, Marcel Borde, mariage relaté dans Le Petit Marseillais ; elle divorce pour épouser en secondes noces, en 1935, Alphonse Dubourguier (1902-1995), avocat.


L'histoire de ce journal, fondé en 1868 et disparu en 1944, est intimement liée avec la famille Samat, de la descendance Moutte. Aussi, elle mérite qu'une page lui soit consacré avec les liens généalogiques des trois co-fondateurs: Toussaint Samat (1837-1916) qui est à l'origine du projet, son beau-frère Jean Baptiste Lazare Peirron (1845-1916) et Denis Ferdinand Bourrageas (1842-1902).

Le Petit Marseillais de 1868 à 1944 : une histoire de familles


Quelques références et liens

Bertin H. (1882). Bustes et masques marseillais. Laveirarié Père, Marseille, 1e Série, 125 p. [Alphonse Moutte : p. 63-64 ; Samat : p. 65-66].

Dubois M., Gaffarel P. & Samat J.-B. (1928). Histoire de Marseille. Imprimerie municipale Marseille, 222 p.

Repelin J. (1932). Jean-Baptiste Samat (1865-1931). Mémoires de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Marseille, p. 353-355.

Rosaz-Brulard M.-J. (1988). Il y a quelque cent ans, la presse marseillaise. In : Hommes, idées, journaux. Éditions de la Sorbonne, Paris, p. 67-81.

Orsoni S. (1944). Premier grand procès de patrons de presse collaborationnistes : le procès Albert Lejeune et Jean Gaillard- Bourrageas du Petit Marseillais - octobre 1944. https://museedelaresistanceenligne.org/

Combat (21-10-1944). L'affaire du "Petit Marseillais" (article). N° 114, 4e année, p. 1-2.