Close

Colmar : Wagkeller (ou Waagkeller)


 

Blason du Wagkeller
sur le linteau de la cheminée de 1536 (Musée d’Unterlinden, Colmar).

 


 

Plus sur les familles, dont des membres du Wagkeller

 


 

1575
la Réforme à Colmar

 


 

La Gesellschaft zum Wagkeller von Colmar (Société du Wagkeller de Colmar) réunissait les notables de la ville, principalement des magistrats (Stattmeister, Obristmeister) et leurs invités. Elle a aussi été servie d'auberge du patriciat local (Schichtlé, 2011). Son appellation varie, d'abord Trinkstube en 1408, puis Herrentrinkstube en 1434, il prend le nom de Wagkeller en 1480.

Régie par une réglementation particulière, le Wagkeller permet non seulement à ses membres de se réunir entre eux en toute convivialité après les séances du Conseil, mais également d’y convier leurs familles pour y célébrer diverses cérémonies officielles, des fêtes religieuses et familiales, car les membres du Wagkeller aimaient s'y retrouver autour d’une bonne table.

Le Stubenmeister avait sous ses ordres une personne – le Hauptkann – chargée du bon fonctionnement matériel du Wagkeller. Ses attributions sont diverses, il doit servir les membres de la société dans la discrétion et le respect. Le règlement du 7 mai 1621 définit ses fonctions. En collaboration avec le cuisinier, il assure la comptabilité des repas consommés au siège. Responsable du bâtiment, il ferme les portes tous les soirs. Le Hauptkann interdit l’entrée à toute personne étrangère à l’assemblée et assure également la propreté des lieux. Il veille à la sécurité afin d’éviter tout incendie y compris les dimanches et jours de fête. Dans la liste des Stubenmeister, élu annuellement on peut citer : Andreas Sandherr de 1688 à 1719, Jean Buob de 1719 à 1748, Jean Frédéric Sandherr de 1764 à 1777.

Fig. 1. À droite : dessin rehaussé de lavis du Wagkeller en 1582 par Marx Friedlein qui a aussi réalisé la peinture du Wagkeller (Waldner, 1902). À gauche : il ne subsiste plus que ce vestige du batiment médiéval de caractère Renaissance, qui se trouvait à proximité de l'ancien couvent des Augustins ; et, aujourd'hui, sur le square Pfeffel, entre la prison et le tribunal de Grande Instance (construit en 1771) avec lequel il est parfois confondu.

La première mention date du XIVe siècle. Diverses mentions existent notamment en 1421 et 1424. En 1478, le bâtiment s’est formé à partir d’un groupe de maisons par achats successifs. Parmi ces acquisitions, figure en 1512 une maison nommée zur Hölle, touchant d’un côté au chœur de l’église des Augustins, de l’autre à l’auberge zum Vogelgesang et à l’arrière au Wagkeller. Ces deux maisons ont aussi appartenu à des ancêtres. Dès 1459, et surtout après sa reconstruction en 1532, le Wagkeller fait fonction d'Hôtel de ville et la conserve avec quelques interruptions jusqu'à ce qu'il dût céder sa place au Conseil Souverain d'Alsace en 1698. Par lettres patentes de Louis XIV, signées en 18 mars 1698, il devient le siège du Conseil Souverain d'Alsace avec transfert au 1er mai depuis Brisach dans le Wagkeller créé en 1480. Aujourd'hui il ne subsiste dans le square Pfeffel, à l'arrière du Tribunal de Grande Instance et la prison, que la façade à pignon de style gothique tardif avec des parties Renaissance du Wagkeller.

L’origine du nom viendrait de la statue (datée de 1585) de Niclaus Börlin, originaire de Rorschach (St-Gallen, Suisse), symbolisant la justice tenant d’une main la balance, de l’autre le glaive (visible sur la fçade du Wagkeller) et rappelant ainsi l’origine du nom Wagkeller (caveau à la balance). Une réplique de cette statue (faite en 1970) est en haut de la façade de l'actuel Tribunal de Grande Instance - photo ci-contre.

Une autre explication serait liée au Watkeller (Wat = Tuch = drap) qui signifierait la cave où étaient entreposés les draps. La première halle aux draps est effectivement mentionnée sur la place du Marché (actuelle place du Marché- aux-Fruits) dès 1226.

L’admission au sein de la société est rigoureuse. En 1539, elle comprend 48 membres, issus du patriciat, dont l’Obristmeister, les trois Stattmeister, les conseillers, le prévôt, le greffier-syndic, le greffier du tribunal, le prieur de Saint-Pierre, les nobles de Hattstatt. Quarante ans plus tard, le Wagkeller réunit 48 membres résidants et 10 extérieurs parmi lesquels le bailli de Sainte-Croix-en-Plaine. Au XVIIe siècle et jusque dans les années 1670, les effectifs se stabilisent autour d’une trentaine de sociétaires.

Des membres de nos familles ancestrales en ont fait partie jusqu’à la dernière liste, datée de 1777, notamment avec Matthias Sandherr et Benjamin Gloxin. Leurs armoiries familiales se trouvent dans la clé de voûte de l’escalier du Wagkeller, datée de 1595 (Fig. 2). A noter qu’à partir de 1588, le bâtiment est restauré. De nouvelles salles sont aménagées et meublées. La clé de voûte est conservée actuellement dans les réserves du musée Unterlinden (n° inv. 2012.0.1228). Vous en trouverez en PJ la meilleure photographie dont nous disposons, prise pendant la 2e guerre (crédit : Robert Läuffer / Musée Unterlinden, Colmar).

 

Fig. 2. Cette clé de voûte date de 1595 et les six armoiries reproduites sont celles des six magistrats de l'année 1595, pendant laquelle furent terminés les travaux de restauration du Wagkeller : quatre sont des cousins et deux nos ancêtres directs. Ci-dessous la liste avec leurs initiales gravées et le blasonnement de leurs amoiries. Pour plus de détails voir les pages Armoiries et Onomastique. Photo crédit/© : Robert Läuffer / Musée Unterlinden, Colmar - elle date des années 1940,

  1. Ludwig Kriegelstein (1542-1625) - L. K. C - Obristmeister : D'or à trois billettes d'azur, l'une sur les deux autres, coupées d'azur à un soleil de douze rayons dardant d'or, mouvant du trait - Cousin par alliance par Martin Birr (ci-dessous n°5).

  2. Beat Hensslin - B. H. - Schultheiss, Stattmeister : D'azur, à un carré et ses diagonales évidé du champ et soutenu par un mont de trois coupeaux de sinople - Cousin par alliance par les Wetzel-Fenger. Voir vitrail en bas de page.

  3. Sebastian Wilhelm Linck (1540-1617) - S. W. L. : D'or, à une rencontre de taureau de sable, acornée et annelée d'argent - Cousin par alliance par les Kriegelstein et Birr.

  4. Andreas Sandherr (1533-1600) - S. H. - Stadtschreiber : Porte diapré d'argent à trois trèfles de sinople, dont les tiges de même sont entrelacées en pal et sautoir, et mouvantes d'une colline de trois coupeaux de gueules, et traversées d'une flèche d'or ferrée de sable et empennée de gueules - Sosa 9818 - G14.

  5. Martin Birr (1540-1600) - M. B. - Stattmeister : De sable à trois fleurs de lis mal ordonnées d'argent - Sosa 4892 - G13.

  6. Matern Eschbach (✝1602) - M. E. - Stattmeister, ancien Obristmeister : D'argent à un frêne de sinople posé sur une terrasse de même traversée d'une rivière au naturel - Cousin par alliance par les Ortlieb.

Mossmann (1878) a publié la liste des burgmeister et des obristmeister, dont est extraite la page 153 ci-contre, liste allant de 1571 à 1640 [Nota : les noms de famille y ont été uniformisés] - tous sont des cousins ou des ancêtres directs qui ont milité et appliqué la réfome luthérienne à Colmar, ville d'Empire de la Décapole alsacienne. Cliquez sur la liste pour l'agrandir...
Récemment, Wallace (1995) a aussi publiée une liste des magistrats de Colmar entre 1575 et 1627, qui donc s'inscrit entre l'adoption de la Réforme (1575) et le début de la Contre-Réforme (1627) - liste ci-contre modifiée, incluant notre parenté et ceux membres du Wagkeller - Cliquez dessus pour l'agrandir...

L'organisation du corps municipal de Colmar peut se résumer ainsi : à sa tête se trouvait le Magistrat, composé de l'Obristmeister, des trois Stattmeister, du Schultheiss (prévôt) et du Stadtschreiber (syndic, greffier) ; ensuite venait le Conseil composé de trente élus des corps de métiers, plus l'Obristmeister, le Schultheiss et le Stadtschreiber. Leurs charges, comme celles du magistrat, étaient soi-disant annuelles, ce qui ne signifiait plus rien, car ceux qui en étaient revêtus, alternaient entre eux chaque année – voir liste ci-dessus.
La traduction en français des titres est pratiquement impossible puisqu’il n’y a pas de correspondance, ni dans les titres, ni dans les charges ; en outre, ils pouvaient changer selon les localités, en Alsace même.


Le sculpteur et tailleur de pierre Niclaus Börlin (1582-1597) mérite un paragraphe, car il est resté peu connu :
né à Rorschach (St. Gallen, Suisse) au bord du lac de Constance, il est maître tailleur de pierre à Colmar dès 1576. En 1597, son acte de décès par le pasteur Irsamer dans le registre paroissial protestant de 1597 mentionne : „Den 14. Juli ist Niclaus Börlin, der Steinmetz und dieser Stad gewesener getreuer Werckmeister, ein frommer, gottsfürchtiger, aufrichtiger, ehrlicher Mann und ein kunstreicher Werckmeister, desgleichen man gewis in 50 Meilen Wegs nit gefunden, wie seine Kunstück ihn nach seinem Tode rhümen werden, denn derselben viel hie gefunden werden, begraben worden“ [Le 14 juillet, Niclaus Börlin, le tailleur de pierre et le fidèle maître artisan de cette ville, un homme pieux, craignant Dieu, sincère, honnête et un maître artisan de grand art, a été enterré à 80 km de là, tout comme ses œuvres d'art le loueront après sa mort, car elles ont été trouvées ici à de nombreuses reprises]. Ses travaux à Colmar, d’après des factures municipales, ont principalement concerné la reconstruction du Wagkeller entre 1588 et 1595 et le Koïfhus (ou ancienne douane). Son fils Heinrich, né en 1588, à Colmar est lui aussi devenu maître tailleur de pierre entre 1628 et 1633.


Références

Bulletin bibliographique (1890). V. Société Schœngauer. Revue d'Alsace, 41, 143-144.

Chauffour F. (1863). Notice sur la société du Waagkeller à Colmar. Curiosités d'Alsace, 2e année, 1e livraison, p. 56-78.

Lichtlé F. (2011). Une société et une auberge de notables sous l’Ancien Régime. Revue d'Alsace, 137, 307-324.

Hunkler T. F. X. (1838). Geschichte der Stadt Colmar und der umliegenden Gegend. Reiffinger, Colmar, 525 p.

Lemaître A. J. (2015). Le conseil souverain d'Alsace. Les limites de la souveraineté. Revue du Nord, 97 (411), 479-496.

Metzenthin E. (1954). Les Kriegelstein et leur origine. In : Anciennes familles colmariennes. Annuaire de la Société historique et littéraire de Colmar, 4, 67-76.

Mossmann X. (1878). Recherches sur la constitution de la commune à Colmar. Vve Jung, Colmar, nouvelle édition, 175 p.

Waldner E. (1902). Baugeschichtliches aus dem alten Colmar. Mittheilungnen der Gesellschaft für Erhaltung der geschichtlichen Denkmäler im Elsass, 2e Série, 20, 99-103, 1 pl.

Wallace P. G. (1995). Communities and conflict in early modern Colmar: 1575-1730. Humanities Press, Boston, 299 p.

Fig. 3. Vitrail de Beat Hensslin [Henßlin] daté de 1589
(au Musée Unterlinden, Colmar) - cliquez dessus pour agrandir
[Crédit/© : Musée Unterlinden]

  Généalogie complète   [ sur site emig]     Généalogie complète   [sur site abouisson]

Carte Colmariensis civitatis & circumjacentis agri pictura ad vivum expressa,
publiée en 1550 par Sebastian Münster, p. 450-451.


Web site design and build by CdM Créations | Copyright © Christian C. Emig et Christian de Mittelwihr | Contact