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Maison natale d'Auguste Bartholdi, aujourdhui le Musée Bartholdi
Sise 30 rue des Marchands, Colmar
Au cours d’un récent échange épistolaire, la signification de la porte renaissance surmontée d’un œil-de-bœuf à l'entrée depuis la cour dans la maison natale d’Auguste Bartholdi à Colmar, a été mise en questionnement. En effet, l’ornementation de cet œil-de-bœuf serait l’œuvre du sculpteur avec une symbolique ésotérique.
Qu’en est-il ?
Testament et Legs
Le testament manuscrit d’Auguste Bartholdi - extrait du testament établit que si sa mort survient avant celle de son épouse Jeanne Emélie Bayeux dite Emilie Bayeux de Puysieux, cette dernière est sa légataire universelle À Paris, au 82 rue d'Assas, 6e, il y décède 4 octobre 1904 et elle le 12 octobre 1914 - . Cependant, il faut remarquer que, dans le cas contraire, ses légataires auraient été Marguerite et Louise Scheurer, arrières-petites-cousines germaines, filles de Marguerite Berdot (1832-1870) [dont il a fait le monument funéraire, à Colmar] et Auguste Scheurer (1836-1905) ; outre cette proche parenté avec Auguste Bartholdi, les deux sœurs partagent au moins 36 ancêtres communs. L'auteur de ces pages, Christian Emig, a lui 49 ancêtres communs avec elles. 
En 1907, sa veuve fait un long séjour à Colmar, d’abord pour inaugurer, près du Château d’eau, un monument commémoratif d’Auguste Bartholdi (le 26 mai), puis le 25 juin, par-devant Me Marie Joseph Kubler, notaire, elle fait don à la Ville de Colmar de la maison natale de feu son mari, sise 30 rue des Marchands, avec tout son contenu (meubles, bibliothèque, objets d’art, etc.) telle qu’elle se composerait au moment de son décès. S’y ajoutait, l’ensemble des objets mobiliers se trouvant dans son domicile parisien, 30 rue d’Assas, ou entreposés ailleurs, au jour de sa mort, y compris « toutes les œuvres, maquettes architecturales et sculpturales [sic], les tableaux, les gravures, collections, objets d’art, etc., ayant appartenu à son époux et qui devaient être transportés dans l’immeuble donné à la Ville » ; celui-ci sera dénommé « Musée Bartholdi » ; restera affecté à cet usage à titre exclusif et, condition ultime stipulée par elle, sourcilleuse à l’endroit d’impeccable moralité : « la personne chargée de la conservation du musée devra toujours être de religion protestante et être alsacien-lorrain née en Alsace-Lorraine de parents également d’origine alsacienne-lorraine et en premier un colmarien » !
Depuis 1909, un certain nombre d’objets d’art garnissant l’appartement parisien ou appartenant au fonds d’atelier de l’artiste avaient été acheminés à Colmar. Ralenti pendant la guerre et interrompu très certainement avec l'Alsace, le transfert des biens légués à d’autres institutions se poursuit et à l’issue du conflit s’achève en 1919 à Colmar.
Le musée est inauguré le 18 novembre 1922.
- Testaments des époux Bartholdi dans les Minutes et répertoires du notaire Gustave DEMANCHE, déposés aux Archives Nationales [et extraits en pdf] - dont : un inventaire (original au musée à Colmar) dressé le 23 décembre 1914 après le décès de Mme veuve Bartholdi.
Testament d'Auguste Bartholdi (extraits)
- Legs de 300 000 fr. (fondation) fait à la Société des Artistes français et un autre à la même Société de 13 000 fr. pour le Prix du Palais Longchamp, mis en place par Mme Bartholdi en exécution des volontés exprimés par son mari. Ce dernier en fut vice-président et président de la section sculpture.
- Legs Bartholdi à la Société de l’Histoire du Protestantisme Français (Paris).
- Fondation pour deux lits à l'hôpital de Colmar, réservés à des artistes français.
- Legs au Musée Unterlinden de Colmar, dont une réduction de l'atelier où se construisit la Statue de la Liberté éclairant le monde.
Inventaire après le décès d'Emilie Baheux, veuve Bartholdi et testament
Testament et inventaire
L'inventaire du 82, rue d'Assas, Paris 6e, a été fait par le notaire
Portrait d'Emilie Bartholdi, par le peintre alsacien Jean Benner (1836-1906) - © collection Musée Bartholdi >
en cours de rédaction
Un testament à l'intention du couple employé au service des Bartholdi pendant 40 ans : Léonie Guillemin et Emile Coulon - à vérifier = en cours.
Porte Renaissance
Le dessin de cette porte est publiée par Hansi (1873-1951) en 1923 à la page 97 avec la légende suivante : Une belle porte Renaissance que M. Bartholdi , statuaire, fit transporter de son jardin dans sa maison au n° 30 de la rue des Marchands (Fig. 1) ; ce jardin est celui du château Bartholdi dans la Krutenau à Colmar. Ainsi, on peut penser que ce dessin a été réalisé après le décès d’Emilie en 1914. Et donc qu’à cette date l’œil-de-bœuf n’a pas encore été installé (Fig. 2).
<< Fig. 1. Dessin de la porte Renaissance de la 2e moitié du XVIIe siècle par Hansi (1923).
Un échange avec Isabelle Bräutigam, directrice du Musée, nous apprend que cette porte a été installée vers 1895 par Bartholdi et que l’œil-de-bœuf date de 1929 et est l’œuvre d’un artiste inconnu (d'après l'I.M.H.) (Fig. 3). Aussi, malgré l’absence de tout document sur la symbolique prévu par l’artiste, on peut affirmer que le B est non seulement l’initiale de Bartholdi, mais l'ensemble est le sigle utilisé par le sculpteur sur son papier à lettre ; en dessous du B, on trouve un trèfle, une des figures des francs-maçons auxquels appartenait le sculpteur (Loge d'Alsace-Lorraine de Paris), ce qui est largement connu. Pour le personnage assis en bas et les deux têtes de coq de chaque côté du B, l'explication la plus vraisemblable est à trouver dans la Bible : le bouc (qui ici n'a pas les caractéristiques d'un supposé Baphomet) représente le mal, alors que les deux coqs au-dessus pourraient représenter le couple Bartholdi, le coq étant symbole de lumière et de résurrection au jour du jugement dernier (Fig. 3) [*]. Un rappel au protestantisme affirmée du couple et du lieu, que l'épouse rappelle dans son legs. Aussi, il est invraissemblable que ce bouc aux cornes naissantes et fortement recourbées puisse représenter le Bouc de Mendès (ancienne cité égyptienne du delta du Nil un rappel aux voyages en Egypte de Bartholdi ?) qui est un des noms donnés à la représentation de Baphomet par Éliphas Lévi au XIXe siècle. À noter qu’en langue égyptienne, Mendès signifiait bouc. Un rapprochement avec des pratiques déviantes catholiques est ici totalement hors-sujet.
Fig. 2. Porte Renaissance dans son état actuel - inscrite aux Monuments Historiques. Aujourd'hui, l'entrée du Musée.
|  Fig. 3. Détail de l'œil-de-bœuf, au-dessus de la porte ci-contre. |
Reste un petit point sur la date de 1929 car cette porte de la 2e moitié du XVIIe siècle est inscrite aux monuments historiques par arrêté du 18 juin 1926, mais cela ne devrait pas empêcher ce ajout qui ne modifie pas la porte elle-même.
Remerciements : ils vont à Madame Isabelle Bräutigam, directrice du Musée Bartholdi, et à Monsieur Fabrice Fourmanoir pour leurs renseignements et aide.
[*] J'ai souvenir de ma jeunesse en Alsace que les églises protestantes se distinguaient par la présence d'un coq sur le clocher, là où les catholiques avaient une croix. Néanmoins, je n'ai pas réussi à trouver une explication, ni une confirmation.
Quelques références et liens
Monument Bartholdi près du Château d'eau de Colmar vers 1910.
|  Musée Bartholdi (date inconnue, après 1909) |
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